Strategic Culture Foundation, éditorial du 14 mars 2025
Selon l'administration Trump, la balle est dans le camp de la Russie concernant une proposition de cessez-le-feu de 30 jours en Ukraine.
La trêve proposée a été annoncée à la suite de discussions mardi en Arabie saoudite entre le secrétaire d'État américain, Marco Rubio, et des représentants du régime ukrainien soutenu par l'OTAN. M. Rubio a déclaré qu'il appartient désormais à la Russie de répondre à la volonté présumée d'un cessez-le-feu de la partie ukrainienne.
En réponse, le président russe Vladimir Poutine a déclaré avec tact que la Russie est ouverte à un cessez-le-feu, mais seulement s'il conduit à un règlement de paix complet et global. M. Poutine a répété que pour être durable, la résolution doit s'attaquer aux causes profondes du conflit et aux préoccupations stratégiques fondamentales de la Russie en matière de sécurité.
Le dirigeant russe a ensuite rencontré l'envoyé spécial de Trump jeudi. À la suite des discussions à Djeddah entre les États-Unis et le régime de Kiev, l'envoyé spécial de Trump, Steve Witkoff, s'est rendu à Moscou où il a rencontré Poutine. Les détails de leur conversation n'ont pas été divulgués. Mais il a été rapporté que Witkoff a transmis à Poutine des "informations complémentaires" fournies par Trump concernant le cessez-le-feu proposé. Witkoff serait rentré à Washington avec des indications données par Poutine. On peut supposer que la position russe sur ses conditions a été réitérée. Trump a salué les échanges comme étant "productifs".
C'est là que le bât blesse. Les questions sous-jacentes essentielles concernent l'expansion agressive de l'OTAN et l'armement du régime néonazi ukrainien. Les États-Unis et leurs partenaires de l'OTAN ont attisé le conflit en Ukraine pendant plusieurs décennies, au moins depuis la fin de la guerre froide en 1991. La guerre qui a sévi en Ukraine ces trois dernières années n'est que le symptôme d'une hostilité plus ancienne et systématique. Trump semble être conscient de ces enjeux.
L'administration Trump a mis fin à la fausse propagande de guerre de l'administration Biden. Il est désormais reconnu à Washington que le conflit en Ukraine est une guerre par procuration entre l'axe OTAN dirigé par les États-Unis, et la Russie.
Comme le démontre la spectaculaire défaite militaire des forces par procuration de l'OTAN à Koursk cette semaine, ainsi que les rapides avancées de la Russie contre le régime en déliquescence de Kiev, le "projet Ukraine" piloté par les États-Unis a été vaincu. La Russie a pratiquement gagné la guerre par procuration.
Les Américains (et leurs diverses factions) et leurs alliés de l'OTAN tentent d'éviter d'admettre leur défaite en mettant en place un processus de paix de façade qui ne fait que transformer le conflit en un "gel des hostilités" aux portes de la Russie.
La meilleure façon de mettre fin à la guerre pour les États-Unis serait de cesser d'armer le régime de Kiev et de lui fournir des renseignements et un soutien logistique.
Cette semaine, Trump a repris les livraisons militaires et de renseignements au régime de Kiev, parallèlement à l'offre présumée de cessez-le-feu du régime ukrainien. Cela revient à faire un pas en avant, puis deux pas en arrière.
La déclaration de Marco Rubio, chef de la diplomatie américaine, figurant un honnête médiateur de paix en disant à la Russie que la balle est dans son camp pour répondre à la paix en tant que "compromis" avec l'Ukraine, relève du ridicule.
L'administration Trump a une vision erronée du conflit si elle pense que la Russie peut être influencée par les exigences unilatérales et arrogantes des États-Unis.
La Russie est en train de gagner une guerre décisive, pas de jouer au tennis.
Quoi qu'il en soit, la balle, pour ainsi dire, est et restera fermement dans le camp des États-Unis jusqu'à ce qu'ils acceptent la défaite et les conditions de la victoire de la Russie. C'est aux États-Unis, et non à leurs vassaux européens ou aux sbires du régime de Kiev, qu'il reviendra de prendre cette décision.
Ces conditions ont été stipulées à plusieurs reprises par Moscou :
- soit un traité de sécurité durable en Europe conforme aux exigences justes et fondamentales de la Russie pour que l'OTAN recule et renonce à ses intentions agressives
- que l'Ukraine soit à jamais un État neutre et ne rejoigne en aucun cas l'OTAN
- que le régime néonazi soit éradiqué et que les droits fondamentaux des personnes d'origine russe soient garantis et respectés, et
- que les territoires russes historiques de Donetsk, Lougansk, Kherson, Zaporijia, et bien sûr la Crimée, conservent leur intégrité au sein de la Fédération de Russie.
Moscou se réserve le droit de modifier les termes des conditions sur le terrain si le conflit persiste, par exemple en récupérant ses territoires historiques d'Odessa, de Kharkiv et de Nikolaev, et en imposant une zone de non-bombardement dans l'oblast de Soumy, en Ukraine, d'où a été lancée l'offensive ratée de l'OTAN à Koursk en août dernier.
Comme le souligne Poutine, la reprise de Koursk par la Russie a été couronnée de succès, mais on peut s'attendre à de graves événements avant même qu'un cessez-le-feu ne soit envisagé. Les agresseurs, y compris les mercenaires de l'OTAN, ont commis des crimes de guerre contre des civils. Doit-on s'attendre à ce qu'ils soient tout simplement relâchés ? C'est sans doute la raison pour laquelle les États-Unis et l'Ukraine font soudainement pression pour un cessez-le-feu afin de sauver les meubles et de se réarmer.
Trump devra faire face aux réalités d'une Russie en position de force : sa victoire militaire et sa cause historiquement juste pour faire face à l'agression de l'OTAN.
Reste à voir comment Trump va réagir. Il va devoir dissiper l'idée erronée et présomptueuse selon laquelle Washington jouera le médiateur dela paix. Les États-Unis sont les principaux protagonistes d'une guerre par procuration contre la Russie. Le régime de Kiev n'est qu'un acteur secondaire. Moscou n'a ni besoin ni envie de s'engager avec un régime néonazi corrompu dirigé par un président fantoche dont la légitimité n'est plus que pure apparence après l'annulation des élections l'année dernière et le rétablissement de la loi martiale.
Si Trump veut vraiment mettre fin à la guerre par procuration en Ukraine, il peut le faire très facilement en stoppant l'approvisionnement en armes du pays. La reprise des livraisons d'armes cette semaine n'est pas de bon augure.
Trump devrait également ignorer les pleurnicheries des laquais européens, en particulier des Britanniques, qui n'ont rien de constructif à offrir. Londres serait "intimement" impliquée dans la dernière proposition de cessez-le-feu des États-Unis et de l'Ukraine, selon la BBC. On devrait y voir le signe avant-coureur d'un sale coup.
Que la déclaration conjointe États-Unis-Ukraine de cette semaine en Arabie saoudite colporte de vils mensonges sur l'enlèvement d'enfants ukrainiens par la Russie n'augure rien de bon. De plus, il est scandaleux que la déclaration ait appelé à "de futures garanties de sécurité pour l'Ukraine" (l'agresseur !) sans mentionner les préoccupations de la Russie en matière de sécurité. Ce silence indique une méconnaissance des "causes profondes" du conflit de la part des États-Unis.
En outre, la déclaration conjointe américano-ukrainienne a appelé à la participation de partenaires européens aux pourparlers de paix. La génération actuelle de dirigeants européens n'a ni l'intention ni la capacité de négocier une paix durable avec la Russie. Ils insistent pour que l'Ukraine devienne un futur membre de l'OTAN et veulent s'immiscer dans le dialogue pour faire échouer l'accord de paix en déployant des troupes de "maintien de la paix". Les Britanniques et les Français auraient l'intention de demander aux États-Unis de fournir une couverture aérienne à ce qui s'apparenterait à une présence militaire à risque, avec pour corollaire une recrudescence de la guerre.
Trump se laissera-t-il berner par les perfides russophobes britanniques, français et autres Européens ? Éventuellement en recourant à une provocation sous faux drapeau ?
Les dirigeants politiques américains et européens ne jouissent que de peu de crédibilité pour proposer un cessez-le-feu à la Russie, sans parler d'une paix durable. Ils ont déclenché cette guerre et veulent la poursuivre sournoisement par d'autres moyens sous le couvert d'un processus de paix qui ne s'attaque pas aux causes profondes du conflit.
Autrement dit, le seul moyen de s'attaquer aux causes profondes du conflit et d'instaurer une paix durable est que la Russie écrase l'ennemi OTAN par une capitulation explicite et inconditionnelle. L'ego de Trump pourra-t-il le supporter ?
La paix commence lorsque les armes se taisent, mais pour garantir une paix durable, la guerre de l'OTAN contre la Russie, menée par les États-Unis, doit être mise en échec. L'État profond impérialiste américain pourra-t-il le supporter ?
D'une manière ou d'une autre, nous le saurons bientôt.